Contexte et objectifs

La Directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l’eau, dite « Directive Cadre sur l’Eau » (DCE), est entrée en vigueur en décembre 2000. Depuis cette date, elle a conduit les Etats membres à évaluer l’état de leurs masses d'eau (lacs, rivières, eaux souterraines).

Lacunes de la surveillance environnementale actuelle

Malgré un effort d’analyse sans précédent, les données recueillies dans le cadre des programmes de surveillance de la Directive cadre sur l’eau souffrent d’un manque de représentativité de la réalité environnementale.

Des échantillonnages d’eau ponctuels

Tout d'abord en raison de la nature variable de cette contamination. En effet, les échantillonnages ponctuels d’eau, réalisés dans le cadre des suivis DCE à intervalles relativement espacés (≥ 1 mois), ne rendent que partiellement compte des fluctuations des concentrations en contaminant au cours du temps, et peuvent conduire à une appréciation biaisée de la contamination du milieu (notamment par des substances transférées sous forme de pulses de courte durée, comme les produits phytopharmaceutiques).

Un panel limité de substances ciblées

Par ailleurs, les approches actuellement utilisées pour évaluer le risque lié à la présence de substances chimiques dans l’eau et les milieux aquatiques dans le cadre de la DCE se limitent aux seules substances figurant dans les listes règlementaires (substances prioritaires européennes, polluants spécifiques définis à l’échelle nationale, substances pertinentes à surveiller) ou à celles possédant un seuil de dangerosité (concentration sans effet prévisible sur l’environnement, PNEC). Les méthodes d’évaluation actuelles ne tiennent pas compte de la diversité des molécules et des niveaux de concentration auxquels les organismes sont exposés dans le milieu, compliquant l’interprétation des résultats en termes de risque écotoxique.

Les interactions entre substances non évaluées

Les effets toxiques potentiels de l’ensemble des contaminants présents ne sont pas évalués, ni l’effet de leurs interactions (effet « cocktail »). En effet, l’approche de norme de qualité environnementale (NQE) qui s’applique à chaque substance prise individuellement, ne permet pas d’évaluer l’effet des interactions de ces substances au sein de mélanges complexes (effets additifs, antagonistes ou synergiques). Pourtant, plusieurs études montrent que des substances prioritaires présentes dans des mélanges à des niveaux de concentration équivalents à leur NQE sont néanmoins capables d’exercer une toxicité envers les organismes aquatiques.

Pour pallier ces lacunes, des outils innovants issus de l’écotoxicologie sont à l’étude; c’est le cas des méthodes biologiques intégratrices ou méthodes de biosurveillance dont l’OFB soutient le développement au travers du financement de projets de recherche tels que le projet DiagnoPICT.

Boucle de rétroaction « caractériser, évaluer, agir »

Une meilleure compréhension des relations de causalité entre état chimique et état écologique est nécessaire pour identifier toutes pressions chimiques capables d’exercer des effets néfastes sur la structure et le fonctionnement des communautés, et pour mettre en place des mesures de gestion appropriées. Une approche de type diagnostic faisant appel à différents outils et utilisant différents éléments de preuve a été mise en avant ces dernières années pour mieux évaluer le risque chimique dans le contexte de la DCE.

Le projet DiagnoPICT

Le projet DiagnoPICT a pour objectif de développer des outils pour améliorer la surveillance de la pollution dans les milieux aquatiques lotiques et lacustres. Ce projet s'articule autour de trois approches complémentaires qui seront déployées simultanément et à large échelle spatiale depuis les petits ruisseaux des mont d'Auvergne jusqu'au lac Léman (voir le liste des sites étudiés)  :

  1. Approche PICT (Pollution Induced Community Tolerance) : Cette méthode consiste à analyser la tolérance induite par une exposition à des polluants chez les communautés microbiennes, c'est à dire, la manière dont la présence de polluants dans l'eau et le sédiment, tels que le glyphosate ou le cuivre par exemple, affecte la structure et le fonctionnement des communautés microbiennes en place.
  2. Metabarcoding : Cette technique permet d'étudier la diversité des micro-organismes en analysant leur ADN, afin de mieux comprendre la composition des communautés bactériennes et algales.
  3. Empreintes chimiques :Cette méthode permet d'évaluer les niveaux de contamination chimique dans les eaux de surface, les sédiments et les organismes vivants.

En intégrant ces analyses avec des paramètres environnementaux comme la température et le pH, le projet vise à constituer une base de données solide. Celle-ci permettra d'affiner le diagnostic des impacts des polluants sur les écosystèmes aquatiques.